Choisir entre l'imparfait et le passé simple :


Marcel Proust – Du côté de chez Swann

Il y (avoir) déjà bien des années que, de Combray, tout ce qui (ne pas être) le théâtre et le drame de mon coucher (ne plus exister) pour moi, quand un jour d’hiver, comme je (rentrer) à la maison, ma mère, voyant que j’avais froid, me (proposer) de me faire prendre, contre mon habitude, un peu de thé. Je (refuser) d’abord et, je ne sais pourquoi, me (se raviser). Elle (envoyer) chercher un de ces gâteaux courts et dodus appelés Petites Madeleines qui (sembler) avoir été moulées dans la valve rainurée d’une coquille de Saint-Jacques. Et bientôt, machinalement, accablé par la morne journée et la perspective d’un triste lendemain, je (porter) à mes lèvres une cuillerée du thé où j’avais laissé s’amollir un morceau de madeleine. Mais à l’instant même où la gorgée mêlée des miettes du gâteau (toucher) mon palais, je (tressaillir), attentif à ce qui (se passer) d’extraordinaire en moi. Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse: ou plutôt cette essence n’était pas en moi, elle était moi.